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Les jeunes accros à l'info (mais pas aux journaux)
Lucas Armati Publié le 03/11/2014. Mis à jour le 04/11/2014 à 04h30

On les dit peu intéressés par l'actualité, méfiants à l'égard des médias traditionnels, scotchés à Facebook... Pas si simple. La nouvelle génération, ultra connectée, apprend surtout à faire le tri dans un monde saturé d'infos.

Sur la route pluvieuse qui mène au lycée Blaise-Pascal de Brie-Comte-Robert, à une quarantaine de kilomètres de Paris, l'inquiétude nous saisit. Les élèves que nous allons rencontrer – des lycéens qui suivent des cours de sensibilisation aux médias – vont-ils regarder le journaliste trentenaire que nous sommes comme le représentant d'un monde en voie de disparition ? En 2012, le think tank américain Pew publiait une étude dont les conclusions nous glacent encore : l'intérêt des 18-29 ans pour l'information s'est effondré et leur désamour ne semble plus guérir avec l'âge, contrairement à leurs aînés. Cette génération va-t-elle finir par tuer l'info ?
La matinée passée en leur compagnie ébranle les préjugés. Elève en première, Sahra nous surprend en parlant des podcasts de France Inter. Adrien, lui, tient à évoquer un reportage de 66 minutes (M6) sur le djihad en Syrie qui l'a secoué. Lucille, en seconde, se plaint du trop grand nombre d'articles en une du Figaro. « Loin de les laisser de marbre, les médias les passionnent, confie une professeure. Même ceux qui avaient décroché reprennent le train. » Déstabilisés par la manière inédite dont les moins de 25 ans picorent l'info, étonnés par leur aptitude à s'intéresser autant à l'épidémie d'Ebola qu'au dernier clip de Rihanna, les médias traditionnels sont perdus. Les jeunes, moins. Curieux, exigeants mais aussi impitoyables, contradictoires et légèrement désabusés, ils ont juste envie de s'approprier le monde médiatique. Loin des clichés, vite formulés vite relayés, sur une supposée jeunesse complètement allergique aux « news ».

Les jeunes et l'info, ça fait deux ?
On ne va pas se mentir, la presse écrite va mal et les jeunes ne se pressent pas pour la réanimer. Au lycée Blaise-Pascal de Brie-Comte-Robert, évoquer l'achat en kiosque semble aussi incongru que parler d'une recherche sur Minitel. L'étonnement est largement partagé par la génération des 15-24 ans. A l'autre bout de la France, Louis, 16 ans, interne dans un lycée d'Orthez, avoue ne jamais avoir l'idée de payer pour un journal : « Deux euros, c'est trop cher pour un lycéen. » Bien sûr, il y a les gratuits (20 Minutes, Direct Matin, Metro­news) ; encore faut-il vivre dans une grande ville. En 1973, 36 % des 15-24 ans lisaient un journal tous les jours ou presque. En 2008, ils n'étaient plus que 10 % (1) . Pour Pauline, 16 ans, élève en première ES à Paris, la presse quotidienne reste encore difficilement abordable : « Jusqu'à l'an dernier, je ne me sentais pas concernée par l'actualité. Du coup, j'ai accumulé les lacunes. Quand j'ouvre Le Monde, beaucoup de mots ou de références me sont étrangers. C'est un peu décourageant. »
Pour contourner cette barrière (réelle ou fantasmée), nom­bre d'entre eux se replient sur la télévision, encore regar­dée deux heures et quarante-deux minutes par jour par les 15-24 ans selon Médiamétrie. Au programme : séries, télé-réalité, mais aussi de l'info (un peu). « J'aime bien le 19.45 de M6, explique Eva, une lycéenne de Brie-Comte-Robert. C'est clair, c'est court. Le journal alterne les sujets sérieux avec des reportages plus légers, ça change ! » Pour ces « digital natives », rien ne vaut cependant Internet – un média proche, accessible, omniprésent. Toujours selon Médiamétrie, les jeunes vivent dans des foyers suréquipés en écrans (6,4 en moyenne – télés, ordinateurs, tablettes, smartphones...). Une large majorité d'entre eux suit l'actualité via son PC. Un tiers le fait sur son téléphone. En réalité, les moins de 25 ans sont saturés d'informations. « Dans ma colocation, tout le monde est abonné à des applications d'info via son téléphone, confirme Vivien, 20 ans, qui va poursuivre ses études au Canada. En cas de grosse actu, on reçoit les notifications en même temps, c'est marrant. De toute façon, aujourd'hui, l'info est partout : dans la rue, dans le métro, sur nos téléphones... Plus besoin d'aller la chercher, c'est elle qui vient à nous ! A nous de savoir faire le tri. »

Tous rivés à Facebook ?
Oui, et alors ? Si 80 % des moins de 20 ans utilisent le réseau social (2) , ce n'est pas que pour poster des « selfies » lors des soirées étudiantes. Ils s'en servent aussi pour lire le dernier article du Huffington Post qu'un ami leur a conseillé, regarder les vidéos des inondations à Montpellier, s'abonner à la page actu du Monde. « Facebook est devenu le premier média d'information des jeunes », résume la sociologue Sylvie Octobre (3) . L'atout de Facebook : la fonction de recommandation, qui remet un peu d'ordre dans un foisonnement numérique légèrement bordélique. « Les réseaux sociaux sont plus proches de nous, confie Maryame, élève du lycée de Brie-Comte-Robert. J'y vais aussi bien pour chercher la date de diffusion des séries aux Etats-Unis que pour échanger avec mes amies. » En creux, l'engouement pour les réseaux sociaux montre aussi à quel point les jeunes se méfient, comme leurs parents, des médias traditionnels. Il y a trois ans, le magazine Phosphore publiait un sondage accablant : 79 % des 15-25 ans y affirmaient que « ce que disent les grands médias est incomplet, orienté ou accentué ». Les consulter, pourquoi pas, mais seulement si un copain digne de confiance conseille les articles « potables ». Cible préférée de leurs critiques : les articles consacrés à la jeunesse (la main de l'auteur tremble en écrivant ces lignes). Confirmation de Maryame : « A part au moment du bac et du brevet, ils nous oublient ou parlent à notre place ! S'ils veulent rajeunir leur public, il va bien falloir qu'ils arrêtent d'interroger les vieux et nous donnent la parole ! »

Impossible de les sortir de leur bulle ?
Trop simpliste. L’année dernière, le sociologue Olivier Galland a coordonné une enquête sur la manière dont les Français se représentent les inégalités (4). Conclusion : les 18-29 ans perçoivent moins d’injustices économiques et sociales que leurs aînés. En cause, selon lui, une expérience encore lointaine de ces phénomènes (du fait de leur âge), mais aussi un manque d’information. Les jeunes adultes délaissent en effet les papiers « politique », « éco » et « société », comme les comptes rendus du dernier Piketty ou les reportages sur le manque de services publics dans la Creuse, pour les rubriques « loisirs », « médias », « sport » et « consommation ». « Ils suivent assez peu les informations générales mais développent des compétences poussées dans des domaines de connaissance très spécialisés, qui constituent des îlots bien distincts les uns des autres », nuance la sociologue Sylvie Octobre.
Victor, 20 ans, étudiant en troisième année d’ostéopathie, est un bon exemple de ces « Robinsons de l’information ». Il suit l’info « de loin », mais est incollable sur le tricking, une discipline encore méconnue, à mi-chemin entre gym acrobatique et art martial, dont il suit la moindre actualité sur Facebook. Pour les médias, l’enjeu est donc de parvenir à construire des ponts entre ces « îles », mais aussi de les relier à d’autres « archipels » culturels et générationnels. L’actualité leur facilite parfois le travail, en supprimant les frontières. Presque tous nos interviewés disent avoir suivi de très près les sujets sur les djihadistes endoctrinés en Syrie et les reportages couvrant le conflit ukrainien – « On se serait cru à la veille d’une nouvelle guerre mondiale », se rappelle Eliot, 19 ans.

La concentration d’une huître ?
Difficile de le nier, les ados ont du mal à rédiger leurs devoirs sans tchatter toutes les deux minutes sur Internet. Forcés d’intégrer cette contrainte, les médias innovent pour maintenir leur attention. La semaine dernière, France 4 a lancé Le point quotidien, une pastille d’info concoctée avec l’impertinent site Vice News. Ces jours-ci, la chaîne met également à l’antenne L’autre JT, un magazine « nouvelle génération », animé par des « gonzo reporters ». Deux tentatives pour « réinventer les formes journalistiques », selon le directeur éditorial Boris Razon, qui devraient mélanger rigueur, humour, info détournée et parti pris. « Ce nouveau ton est très lié au monde numérique où des infos qui n’ont rien à voir entrent constamment en collision, explique-t-il. Mais l’équilibre est difficile à trouver. Il faut se méfier du jeunisme. »
Dans ce cocktail divertissement-information, la réussite télévisuelle de ces dernières années reste Le Petit Journal (Canal+). Alternant analyses moqueuses de la com gouvernementale, reportages sérieux à l’étranger et sketchs absurdes, l’émission satirique de Yann Barthès dépasse les deux millions de téléspectateurs – dont beaucoup de moins de 25 ans. La chaîne cryptée nourrit d’ailleurs l’ambition d’en faire « un JT complet pour la nouvelle génération ». Devra-t-on rire de tout ? « Jusqu’à présent, ils ont trouvé le bon dosage entre humour et info, estime Tom, 19 ans, qui regarde tous les numéros en replay. Evidemment qu’ils en rajoutent dans la caricature des hommes politiques, mais ça ne fait que contrebalancer le discours des journaux traditionnels, qui traitent tout avec sérieux. Et puis, je ne crois pas que les jeunes soient dupes. Moi, je regarde Le Petit Journal pour me marrer, c’est tout. Si je veux des éclaircissements sur un fait d’actu précis, je sais chercher ailleurs. »

(1) « Les pratiques culturelles des Français », ministère de la Culture et de la Communication.
(2) Etude Junior Connect' 2014, par Ipsos MediaCT.
(3) Auteure de Deux pouces et des neurones. Les cultures juvéniles de l'ère médiatique à l'ère numérique, édité par le ministère de la Culture et de la Communication, 2014.
(4) « Dynamique des inégalités : la formation des représentations » (Dynegal.org).



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